C'est par hasard que plusieurs tableaux de
Botticelli me sont apparus déconcertant. Mais le plus représentatif est certainement "La Madone à la grenade". Ce fruit "la
grenade" qui paraît être un détail
tout à fait anodin
dans les peintures de
Botticelli, semble être un réel message à ceux qui veulent bien l'interpréter. Bien sûr, comme d'habitude on
pourrait y voir une parfaite coïncidence, un caprice de l'artiste, ou une mode de l'époque, mais en connaissant mieux la vie de
Botticelli le doute s'estompe. |
La Madone à la grenade (1487) |
Cette peinture (détrempe sur bois) "La
Madone à la grenade" à été réalisée par Botticelli en
1487. Elle est exposée à la Galerie des Offices de
Florence. La Vierge Marie tient dans ses mains l'enfant
Jésus et une grenade mûre et ouverte. Six enfants l'entourent.
Botticelli peignit ce
tondo pour un tribunal florentin qui siégeait dans le palais
de la Seigneurie.
Il faut savoir que dans le symbolisme officielle catholique, la
grenade symbolise la Passion du Christ, ouverte elle symbolise la charité
chrétienne pour tous les hommes. Mais si l'on s'intéresse
de plus près à ce fruit son symbole est tout autre... En
fait, la grenade représente depuis les grecs un symbole masculin
signe de fécondité...
|
La grenade, symbole de fécondité
La grenade est originaire du
Moyen‑Orient probablement d'Iran. Dans la mythologie
grecque, le grenadier est le symbole d'Aphrodite et au
Moyen‑âge, il est un attribut de la Vierge, une association particulièrement étrange pour un symbole de fécondité.
La médecine du Moyen‑âge associait une propriété
curative à une partie du corps humain, par ressemblance.
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|
Ainsi, la grenade était censée guérir les maux de dents, car coupée en deux,
elle rappelle une bouche où les dents seraient les graines.
Mais c'est sans doute
en raison de
l'abondance de ses grains, que la grenade devint symbole de
fécondité. |
La grenade, attribut d'Aphrodite
Aphrodite était la déesse de la beauté et de
l'amour, de la génération, de la mer et de la navigation, de
la vie universelle. Elle sera assimilée à Vénus chez les
Romains.
Ses pouvoirs sont immenses : elle protège les mariages, favorise l'entente
amoureuse des époux, féconde les foyers, préside aux
naissances. Elle fertilise aussi les champs. Elle peut
être également redoutable, car elle symbolise la passion
que rien n'arrête, qui rend fous d'amour ceux qu'elle
veut perdre ; elle ravage même les unions légitimes,
poussent les époux à l'adultère, favorise la fécondité
des amours illégitimes et incite les mortels à toutes
les voluptés et à tous les vices. Aphrodite est alors
une déesse fatale, dont la ceinture magique donne à
celui qui la porte un étrange pouvoir de désirs
perpétuels. Toutefois, ce caractère redoutable
n'apparaît que chez la Vénus des Romains, identifiée
avec Aphrodite. La grenade, fruit aux nombreux pépins,
symbole de la force féconde, lui est habituellement
consacrée. C'est d'ailleurs avec la grenade que
Aphrodite confectionnait des filtres d'amour.
|
Comment interpréter ce symbole ?
Il est clair que la volonté de Botticelli est
de nous suggérer une idée sans doute hérétique.
L'association des représentations de
la Vierge Marie, de l'enfant Jésus, du symbole de fécondité,
et d'Aphrodite déesse de la génération et de la vie
universelle, a de quoi dérouter. La suggestion de
Botticelli annonçant une descendance est presque
évidente. Ainsi la grenade mure et ouverte que Marie et
l'enfant Jésus prennent dans leurs mains symboliserait la
fécondité, la génération universelle, l'immortalité, et donc
la descendance, leur
descendance.
Nous y
voilà :
La descendance Christique, la lignée du
Graal...
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Un autre symbole, les lys |
De façon très discrète, on aperçoit un
enfant à gauche tenant un lys de sa main droite et un enfant
à droite tenant un lys de sa main gauche, soit
2 lys
dans le tableau. Ceci n'est pas un hasard et il convient ici
de rappeler cette symbolique pour comprendre sa dimension.
En effet,
le lys est souvent associé à la royauté française mais toute
chose a une face cachée.
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1 Selon les écrits bibliques de Luc et de
Mathieu, Jésus est un descendant du roi David, premier roi de
droit divin, premier roi d'Israël. Or David est souvent
représenté avec son spectre et
1 lys à son extrémité, symbole de pureté et de
royauté. |
David et son lys
|
2
Jésus, descendant de David, roi des
rois mais d'un royaume divin, fut associé à
2 lys.
Botticelli,
initié, peindra
2 lys
avec la Madone à la
grenade.
L'exemple ci‑contre montre une toile de
Camillo Procaccini
L'Annonciation (entre 1546 et 1629). La Vierge Marie
accueille avec joie l'archange Gabriel lui annonçant
l'arrivée du roi des rois. Elle tient dans sa main droite 2
fleurs de lys.
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L'Annonciation
de
Camillo Procaccini
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3
Les Mérovingiens, descendants
de la lignée de David côté mâle (Les mérovingiens de souche
anglaise sont descendants de David côté femelle), sont Rois de
droit divin. De ce fait, ils sont Rois des rois terriens car ils
reçurent le sacrement de l'onction avec le St‑Chrême.
Clovis,
officiellement reconnu roi mérovingien, reçu d'un ange le
symbole de pureté et donc 1 lys, ce qui porta leur nombre à
3,
visible sur son blason. |
Le blason mérovingien à 3 lys
|
4
Mais la surprise continue.
Pourquoi retrouve‑t‑on 4 lys
sur le drapeau québécois ? Personne ne sait répondre aujourd'hui. Le Québec,
terre promise, aurait‑elle prévue au cours de son histoire
d'accueillir un roi ? Le drapeau a en tout cas été officialiséle
21 janvier 1948.
De plus, une légende est attachée au Québec,
celle du
grand monarque
! |
Le drapeau québécois
et 4 lys
|
5
Retour aux sources
! Le symbole du lys représente la fleur vue de profil mais
si on observe cette fleur du dessus, on obtient
l'étoile à 6 branche, dite
étoile de David.
Le drapeau d'Israël a été
adopté le 12 novembre 1948. Le dessin de base évoque
le taleh, châle de prière
traditionnel de la religion
judaïque
Le drapeau israélien fut créé
par le mouvement sioniste à la fin du 19e siècle
et adopté officiellement à la naissance du nouvel état.
Il faut ajouter que
1948
est aussi l'année de l'officialisation du drapeau québécois.
Le symbole du lys remonte en
fait à une origine beaucoup plus lointaine: l'Égypte. Il
ornait les monuments, les objets, les sphinx. Il
représentait surtout un double pouvoir divin et royal.
Osiris, Isis et Horus en étaient couronnés. Il faut dire que Israël peut
aussi se dire
Isis Râ Ël
|
Le drapeau israélien
et le lys central
Le lys et la croix de David
|
La légende du
grand monarque
Je dis souvent qu'il n'y a pas de
fumée sans feu et bien que la légende qui suit doit être
traitée comme telle, il convient de la rappeler. Ce sont en
effet ces détails qui permettent une meilleure compréhension
de l'ensemble du puzzle.
Que dit cette légende ?
En Nouvelle‑France, le Québec actuel,
Saint Vincent de Paul et
la Compagnie du Saint‑Sacrement,
société secrète, auraient emmené selon certaines légendes un trésor précieux
et
spirituel, un enfant : un garçon de 4 ans, de sang royal, qui
descendrait du roi David et de Jésus.
Était‑il le grand monarque ?
Y aurait‑il une descendance de Jésus actuellement au
Québec ?
St Vincent de Paul, "le protecteur des
orphelins" membre de cette société secrète, disparu d'Europe
effectivement mystérieusement pendant deux ans entre 1605 et
1607. Mais ces dates ne correspondent pas avec La
Compagnie du Saint‑Sacrement qui ne fut crée qu'en 1629.
Néanmoins,
La Compagnie du Saint‑Sacrement, bien
que dissoute partout en 1667, résista au Québec où
elle existe aujourd'hui. Et pour se rendre compte de la
survivance de St Vincent de Paul au Québec il suffit de
faire un test très simple : Prenez votre moteur de recherche
préféré et tapez "Saint‑Vincent de Paul Québec". Sous
Google vous obtiendrez plus de 50 000
occurrences...
|
Les autres grenades de Botticelli |
Voici quelques autres exemples célèbres où
Botticelli, vers 1470, commence à introduire
le symbole de la grenade dans ses peintures |
La Madone à
la roseraie (1470)
La Vierge tient dans sa
main
une grenade fermée
|
La Vierge et l'enfant et 5 anges
(1470)
La grenade est plus discrète mais
toujours présente et ouverte. On peut remarquer également
deux
lys à droite
tenus par des anges
|
La Vierge à la grenade (1472 ‑ 1475)
La grenade et les deux lys sont très visibles |
La Madone du Magnificat (1483 ‑ 1485)
|
Ce célèbre tondo "La Madone du
Magnificat" fut peint par Botticelli entre 1483 et
1485, soit 2 ans avant le fameux tondo "La
Vierge à la grenade", ce qui montre la ténacité du peintre à
glisser ce symbole discrètement.
Entourée d'anges, couronnée d'étoiles et
nimbée d'or, la Vierge écrit le Magnificat sous
l'inspiration du Saint‑Esprit. L'Enfant joue avec une
grenade, et d'un geste tendre appelle l'attention de sa
mère.
La couleur rouge de ses grains est
très nette.
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La Madone du Magnificat
La grenade est rouge et mûre
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La grenade de Leonard de Vinci (1469 ‑ 1470)
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"La Vierge à la Grenade"
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La grenade, discrète
mais clairement présente
|
Léonard de Vinci sera consacré dans un
thème spécifique mais il est incontournable. C'est en 1470,
à la même époque de Botticelli, qu'il réalisa "La Vierge à la
Grenade". Léonard de Vinci montre également une grenade mûre
et ouverte. |
Sandro Botticelli (1444 ‑ 1510) initié... |
Botticelli se forme
Sandro
di Mariano Filipepi dit Botticelli, naquit à
Florence entre mars 1444 et mars
1445. Son père fut tanneur. Le surnom de
Botticelli provient de "botticello", qui signifie
"petit tonneau", nom attribué au départ à son frère aîné
Giovanni. C'est par assimilation, et par la corpulence
probable de l'un ou de l'autre, que le surnom resta.
Vers
1460, Botticelli entre dans l'atelier de Fra
Filippo Lippi
(1406‑1469), moine et peintre de scènes
religieuses, le plus réputé de Florence. Il travaille en
compagnie d'autres peintres tels qu'Antonio del Pollaiuolo
et Andrea del Verrocchio, par lesquels il sera influencé.
Vers 1466 il peignit une "Vierge à
l'enfant et un ange", puis sur le même thème différentes
vierges telles que "La Vierge de la Loggia", et "La Vierge à
l'Enfant, les deux Anges et Jean Baptiste" en 1467,
commandées par différentes familles de la ville. En 1468,
il achève son "Adoration des Rois Mages", qui l'obligea à
complexifier sa technique, la perspective, le nombre des
personnages.
A cette époque beaucoup d'artistes
pratiquaient différents arts en dehors de la peinture, tels
que l'orfèvrerie, la gravure, la ciselure, les émaux. Ce
sont ces techniques qui formèrent Botticelli jusqu'en
1467, date à laquelle Lippi quitta la région de
Florence. Botticelli resta à Florence dans une maison
achetée en 1464 Via della Porcellanna, près de
l'Eglise Ognissanti, dans laquelle il installa son atelier à
partir de
1470.
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Le début de la renommée
En 1468, le Tribunal de Florence lui
commanda une peinture représentant la "Force" pour
l'installer au dessus des sièges des juges. Cette peinture
lui valut une certaine réputation qui lui permit de vivre
plus aisément en peignant des madones, telle la "Vierge à
l'enfant avec les six Saints" en
1470, ou son célèbre " Saint Sébastien" qu'il
fit en
1474 sur un pilier de l'Église Santa Maria
Maggiore.
En 1474, la famille Pucci, lui commanda
un "tondo", une peinture décorative de forme ronde pour une
salle de réception sur le thème de "l'Adoration des Mages".
|
Son autoportrait
|
La même année une autre "Adoration des Rois
Mages " fut commandée par un homme d'affaires Gaspare di
Zanobi del Lama, un partisan des Médicis pour la Chapelle
Santa Maria Novella. Ce tableau est célèbre par le fait que
tous les personnages sont des hommes de la cour ou de
l'entourage des Médicis. Botticelli y réalisa son
autoportrait par un personnage regardant le spectateur. Des
commandes de portraits arrivèrent également. La famille Vespucci de
Florence commanda la célèbre fresque de "Saint Augustin"
qu'il fit en 1480 dans l'Église Ognissanti.
Cette fresque consolida la réputation de Botticelli qui fut
appelé à Rome par le Pape Sixte IV, pour la réalisation de
fresques dans la Chapelle Sixtine en
1481.
Botticelli reçut alors des commandes de
toutes les grandes familles de Toscane. Son atelier réalisa
des tableaux et des fresques pour les grands évènements dans
chacune de ces familles, destinés à décorer les pièces
intérieures des palais.
La célèbre fresque "Le Printemps" fut
réalisée en 1482
dans le Palais de Castello pour la famille Médicis. "La
Naissance de Vénus" qui présente pour la première fois
une nudité féminine non biblique, fut peinte vers
1485.
En dehors des peintures profanes, Botticelli
continua à peindre des tableaux religieux avec la Vierge
comme sujet principal, thème qui était très demandé à
l'époque. Il réalisa la célèbre "Madone à la Grenade"
en
1487 chargée d'une émotion et d'une mélancolie
annonciatrices.
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Botticelli, Grand Maître du Prieuré de Sion
(1483‑1510)
C'est en
1483 que
Botticelli sembla entrer dans une nouvelle période de sa
vie. En effet, c'est à cette date que l'on considère que le
peintre devint
Grand Maître du Prieuré de SION
appelés également "nautoniers" et ceci jusqu'à sa mort.
Botticelli est issue d'aucune famille impliquée dans le
Prieuré de Sion, mais il est probable que les rapports
étroits qu'il entretint avec les grandes familles comme les
Médicis, les d'Este, les Gonzague, et les Vespucci,
favorisèrent ce rapprochement. Ces familles lui fournirent
de nombreux protecteurs. Son maître peintre Filippo Lippi et
Mantegna furent des protégés de
René d'Anjou
ainsi que de l'alchimiste Verrocchio, maître de Léonard de
Vinci.
Botticelli eut un penchant
très marqué pour la tradition ésotérique et on lui attribue
le premier jeu de tarots connu.
|
Le Printemps (1482)
|
Sa célèbre peinture du Printemps
est une illustration des thèmes de
l'Arcadie et du "flot souterrain"
que l'on retrouve chez
Poussin. Cette toile, dont on discute
aujourd'hui encore la signification, se trouvait en
1498 dans la
maison de Via Larga de Lorenzo et Pierfrancesco de Médicis,
cousins de Laurent le Magnifique. Elle sera signalée dans la
villa médicéenne de Castello vers le milieu du XVIe siècle.
Vasari la décrira comme une Vénus figurant le Printemps que les
Grâces fleurissent. Zéphyr, le vent du Printemps, court après
Flore dans un jardin où se trouvent également les Grâces parées
de guirlandes. |
La terreur à Florence
En
1490 une crise politique et religieuse débuta à
Florence. Elle démarra sous l'influence de
Savonarole, prieur des Médicis, qui annonça la fin du
monde à la fin du siècle. Il prêcha l'ascèse et la
pénitence, il exhorta à la vertu, à la vie modeste et à
l'humilité, sous peine du châtiment divin. La peste envahit
alors Florence, et Savonarole fut très écouté. Il provoqua
une crise en condamnant les familles florentines qui se
faisaient représenter dans des tableaux religieux, et
condamna les vêtements riches, les perruques, les bijoux, la
musique, les livres, les tableaux et les sculptures jugés
infâmes. Entre 1497 et
1498, il organisa des
bûchers pour faire disparaître par le feu tous ces objets.
Excommunié par le pape, Savonarole fut arrêté, torturé,
pendu, et brûlé en mai 1498. Cette crise affecta profondément
Botticelli. "La déploration du Christ avec les
saints Jérôme, Pierre et Paul" qu'il peignit en
1490 témoigne de ce doute, de même que les tableaux "La
Trinité avec Marie Madeleine" en
1493, "La Vierge à l'enfant avec Jean‑Baptiste"
en 1495, "La Crucifixion avec Marie Madeleine"
en
1497... Il faut dire que Botticelli partagea les
interrogations et les convictions de Savonarole. Les
symboles de ces convictions sont visibles dans ses
peintures, comme les rameaux d'olivier, allusion aux rameaux
que l'on portait lors des processions organisées par le
moine hérétique.
En
1498, son style changea vers des
peintures plus engagées et plus rebelles aux pouvoirs
des Médicis.
En
1500, Botticelli commença la
représentation de la vie du premier évêque de Florence,
Saint Zénobie en 4 tableaux. Mais devenant infirme, il les
fit achever par son atelier. A partir de
1504, il dut
arrêter de peindre et laissa inachevé une "Adoration des
Mages". Il mourut en mai 1510 dans la maison de la
Via della Porcellanna où il travailla toute sa vie, en étant
reconnu comme le plus grand peintre de son époque.
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