Que l'abbaye de
Port‑Royal
des Champs devait être belle du temps de sa splendeur ! Située au sud‑ouest de Paris, elle reste peu connue, même des Parisiens.
Pourtant ce monastère fondé en 1204 fut le creuset où se mélangèrent de façon intense, vie religieuse, vie politique et vie
intellectuelle.
De célèbres érudits y résidèrent, un enseignement innovant y fut créé et des ouvrages
philosophiques et théologiques y furent écrits. Cet épisode des lumières est encore évoqué aujourd'hui comme une référence. Mais les
historiens abordent peu la destinée de ce lieu tant son histoire est complexe, tumultueuse et violente en cette période centrale du
XVIIe siècle. Des débats théologiques controversés s'invitèrent dans la politique royale et s'opposèrent à Rome, provoquant
des tensions extrêmes jusqu'au désastre de
1609.
Mais surtout des connexions flagrantes existent avec l'affaire des deux Rennes.
Ce cœur janséniste fut évidemment en relation avec le célèbre prélat d'Alet,
Nicolas Pavillon, et certaines relations entre la
Cour et le Razès deviennent troublantes, voire évidentes. Déclarée comme hérétique, l'abbaye sera finalement rasée par
Louis XIV
en 1710. Décidément, après
l'affaire Fouquet
déjà liée à l'énigme, voici que la malédiction du Razès rattrape le Roi‑Soleil avec les jansénistes de
Port‑Royal...
Située au cœur de
la vallée de Chevreuse, au Sud‑ouest de Paris, dans la
commune de Magny‑les‑Hameaux (Yvelines), l’abbaye de Port‑Royal témoigne d'une histoire passionnée, violente et cruelle, elle témoigne
de l'intolérance et de la difficulté à faire progresser une société, elle témoigne aussi de l'incompréhension des hommes face à des
idées trop en avance sur leur temps... |
Une partie des ruines de l'abbaye de Port‑Royal des Champs
Un oratoire construit en
1891 se dresse à la place du
chœur de l'ancienne église |
La piste janséniste a été ouverte avec Nicolas Pavillon,
prélat indépendant hors norme et
que nous savons impliqué dans l'énigme de Rennes. Cette
piste nous conduit bien sûr
à l'abbaye de Port‑Royal, creuset janséniste,
à Blaise
Pascal, Philippe de Champaigne
et Nicolas Poussin,
mais aussi à la duchesse de Longueville,
au prince de Conti, à Jean Loret et bien d'autres...
Je veux remercier ici Franck Daffos qui a tant œuvré dans ses recherches autour
du XVIIe siècle, et qui a su donner cette impulsion pour que
l'énigme de Rennes poursuive sa quête de la vérité...
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Gravure de H. Horthemels ‑ L'abbaye de
Port‑Royal des champs à la fin du XVIIe siècle |
01‑ L'église abbatiale
02‑ Le grand dortoir
03‑ Le cloître et le cimetière
04‑ Les bâtiments des pensionnaires
05‑ Le cimetière extérieur
06‑ Infirmerie
07‑ Le moulin
08‑ Le colombier et la grange
09‑ L'entrée |
10‑ La cour extérieure
11‑ Logement des hôtes
12‑ La Fontaine de la Mère Angélique
13‑ Le jardin de l'Abbesse
14‑ Hôtel de Mlle de Vertus
15‑ Hôtel de Mme de Longueville
16‑ Etang
17‑ Solitude
18‑ Canal |
L'abbaye de
Port‑Royal des Champs aujourd'hui |
Tout près de
Paris, au creux de la vallée de Chevreuse, l'abbaye n'est plus.
Seuls quelques souvenirs sont soigneusement protégés dans un
petit musée et quelques ruines témoignent. Mais pour ceux qui connaissent son histoire et sa
tragédie, Port‑Royal hante encore les lieux. Le site qui est
l'un des plus beaux d'Île‑de‑France, respire la paix et la
solitude. Chaque détour invite à la méditation, à la réflexion
et on se surprend à guetter dans les couloirs du musée des
Granges, les pas de Pascal et de
Racine...
Le domaine des
Granges est entouré d’un très beau parc de 10 ha qui domine les
ruines de l’abbaye de Port‑Royal. Le site chargé d’histoire
attire de plus en plus de curieux. Nombreux sont ceux qui, après
avoir visité le faste de Versailles, veulent comprendre la
tragédie qui s'est déroulée ici, à quelques kilomètres de la
galerie des glaces...
Est‑il
possible de ressentir la douleur de ces hommes et de ces femmes
qui virent quelques siècles d'Histoire du monastère s'effacer
sous leurs yeux dans le crépitement des flammes ? On entendrait
presque les coups de pioches dans le cimetière,
les cris des religieuses et les aboiements des chiens affamés. Pierre par pierre, l'église et le
cloitre furent démontés, des pierres utilisées
aujourd'hui au château de Versailles... |
Abbaye de Port‑Royal des Champs ‑ Le musée
des Granges |
Sur un mur une plaque témoigne du travail
des solitaires |
Le site de
Port‑Royal des Champs est
aujourd'hui un ensemble constitué des
ruines de l’abbaye de Port‑Royal des Champs, du musée national de Port‑Royal, anciennement
"musée des Granges" et d’un vaste domaine forestier et paysager.
Le
site est aujourd’hui classé aux Monuments historiques.
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Le parc et les restes d'un bâtiment |
A côté du musée des Granges, le puits de
Pascal |
Le puits de Pascal |
Une porte encore debout... |
Dans le
bâtiment restant qui sert aujourd'hui de
musée national de
Port‑Royal des Champs, anciennement
musée des Granges, la bibliothèque conserve encore toute sa fraicheur. Les
riches boiseries mettent en valeur les portraits des
habitants de ce lieu hautement historique et des citations
peintes rappellent aux visiteurs que la mémoire de Port‑Royal
doit rester à tout jamais dans les esprits. Le mobilier témoigne
aussi, les chaises brodées portent des noms illustres comme
Philippe de Champaigne ou Marie Angélique.
Il faut noter qu'après le
saccage colossal que subit l'abbaye, c'est une chance inouïe de
pouvoir contempler aujourd'hui ces quelques restes encore
intacts... |
La bibliothèque (Abbaye de Port‑Royal des
Champs) |
La bibliothèque (Abbaye de Port‑Royal des
Champs) |
La bibliothèque (Abbaye de Port‑Royal des
Champs) |
La boiserie porte aussi
la mémoire des religieuses qui se recueillaient chaque jour dans
ces murs. |
Abbaye de Port‑Royal des Champs ‑ Le
Chapitre |
Abbaye de Port‑Royal des Champs ‑
Religieuses dans l'église |
Les religieuses ne sont plus mais "La
solitude" est toujours là
(Le lieu a été réaménagé) |
Les novices se réunissent à "La Solitude"
Dans la boiserie de la bibliothèque une peinture naïve et
espiègle redonne
vie à cet endroit, symbole de Port‑Royal
|
L'abbaye de Port‑Royal a été détruite en
1711 sur ordre
de Louis XIV.
Son
édification datait du début du XIIIème siècle (1204).
Malgré un riche passé du monastère, on ne peut en voir aujourd'hui que les fondations remises à
jour.
Seulement
ont été conservés les bâtiments qui pouvaient être réutilisés
pour l'exploitation agricole, principalement le colombier et
l'ancien moulin.
L'oratoire style néo‑gothique qui se dresse à la place du chœur de l'ancienne
abbaye a été construit en 1891 en hommage à l'abbaye détruite... |
Abbaye de Port‑Royal ‑ Le colombier |
Au milieu des ruines, là où se dressait
l'église, un buste,
celui de Blaise Pascal |
Encore une
fois on retrouve réunies pour l'éternité les deux figures
emblématiques de Port‑Royal, Pascal et Racine, disposées
de chaque côté de l'oratoire... |
Blaise Pascal |
Jean Racine |
Les
fondations de l'abbatiale ont été remises à jour après la
Révolution par le duc de Luynes. Un petit oratoire
néo‑gothique a été ajouté à la fin du XIXe siècle à
l'emplacement du chevet. |
Le lieu où se dressait l'abbatiale de
Port‑Royal des Champs |
Sur la
porte de l'oratoire un court texte rappelle aux curieux le
désastre qui débuta avec la dispersion en
1709...
Cet
oratoire a été édifié en 1891 sur l'emplacement
du Sanctuaire de l'église de Port‑Royal des Champs détruite en
1709 |
Une inscription sur le porche de
l'oratoire rappelle la destruction de Port‑Royal |
C’est l’abbé Grégoire
qui en 1809 célèbre le premier
centenaire de la dispersion. La Société de Port Royal,
avec Augustin Gazier, organise en 1909 les
manifestations du bicentenaire. En 2009, pour la
première fois, une commémoration au niveau national
est organisée aussi bien pour la journée du guichet que
pour la
dispersion, les deux événements marquants de Port‑Royal. |
Comment conclure sur cette page à la fois
illustre et sombre de notre Histoire ?
On retiendra bien sûr un
gâchis énorme et cette fin impitoyable.
Mais l'esprit de Port‑Royal vit toujours car derrière la pensée
religieuse,
il y a aussi des valeurs qui sont aujourd'hui plus que jamais
d'actualité.
Le refus de la pauvreté, du faux semblant, du luxe insolent,
la recherche d'une meilleure éducation, de la connaissance
et le respect de l'Homme furent
une constante préoccupation.
Comment ne pas être intrigué
quand on voit que la Fronde fut dirigée par
quelques rebelles faisant partie de la
sphère de Nicolas Pavillon ?
Comment ne pas se poser de questions quand
on voit que le procès Pavillon/Hautpoul, l'affaire de la régale,
les écus de Loret à Alet, et l'affaire Fouquet gravitent
irrémédiablement autour des deux Rennes ?
Les Solitaires et les
religieuses qui œuvrèrent tant pour Port‑Royal et ses pensées
humanistes finirent dans une fosse. Ainsi l'avaient voulu Dieu et le roi,
ce roi que l'on nomme Roi‑Soleil et qui n'hésita pas à bruler de
ses rayons
ces pauvres âmes... L'affaire de
Rennes serait‑elle vraiment maudite ? |
Louis XIV en armure, en 1663 |
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