Comme
l'église de Rennes‑le‑Château
ou le sanctuaire de ND de Marceille,
le sanctuaire de Notre Dame du Cros a son importance
dans l'affaire des deux Rennes. De par son histoire et ses
personnages qui l'ont côtoyés, elle est extrêmement liée au sanctuaire limouxin. Mais ce n'est pas tout. Elle
participe aussi magnifiquement aux indices laissés par
l'abbé
Boudet, poussé par
l'obsession de délivrer un message à qui pourra le
décoder...
J'invite d'ailleurs le lecteur qui
découvre Notre Dame du Cros à lire ou à relire au
préalable l'histoire de Notre Dame de Marceille,
ces deux récits étant intimement liés... |

Le sanctuaire de ND du Cros près de Caunes Minervois |
Je tiens à remercier ici Franck Daffos
sans qui cette fabuleuse histoire n’aurait peut‑être jamais vu
le jour… Je veux rendre aussi un hommage particulier à
Jacques Rivière disparu trop tôt et qui s'est tant
passionné pour les ermites de Galamus (éd. Bélisane) et
pour toutes ses recherches
dans le Razès qui nous font tant
rêver....
 |

Le sanctuaire de Notre Dame du Cros près de Caune‑Minervois
|
Où est ND
du Cros ?
Notre Dame du Cros n'est
pas située au cœur du Haut‑Razès, mais au nord‑est de
Carcassonne, près de
Caunes‑Minervois, à
35 km de Rennes‑le‑Château. Malgré cet éloignement, son histoire
reste
intimement liée à l'affaire.

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Notre Dame du Cros,
discrètement posée au bord de la Montagne Noire près de
Caunes‑Minervois, se trouve dans un magnifique site
rocheux et bucolique.
Or il faut aussi savoir que depuis le
XVIIe siècle, la région est célèbre pour la qualité de
son
marbre, le marbre de
Caunes‑Minervois qui orne notamment le
Trianon de Versailles et l’Opéra de Paris. |

Notre Dame du Cros ‑ Carte ancienne
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Le marbre de Caunes
On ne peut parler de l'histoire de
Notre Dame Cros sans évoquer l'une des richesses du
Minervois, son marbre.
Le marbre de Caunes Minervois
est unique. Il est facilement reconnaissable par sa couleur
rose
veinée de rouge écarlate,
et il servit
à bâtir entre autres, de nombreuses
cheminées du
château de Versailles, les colonnes de l’Arc
de Triomphe du Carrousel du Louvre ou le
palais
Chaillot.
|

Un exemple de décoration en marbre de
Caunes Minervois ‑ Abbaye de Caunes
|
Les carrières du Minervois furent
exploitées depuis l'Antiquité, puis lentement
abandonnées.
Pourtant, les marbres polychromes
de Caunes ont fait la renommée internationale du
village audois. Ils furent très appréciés par les sculpteurs
italiens en quête de couleur, le rouge “turquin” ou
l’incarnat rouge et blanc. Propriété des moines de
l’abbaye de Caunes, les carrières suscitèrent
l’intérêt de Louis XIV par sa couleur rouge, symbole
de puissance, et veiné de blanc, symbole de la royauté.
Aujourd’hui, seules trois carrières sont
ouvertes et le marbre est exporté à
Carrare, puis en Chine, pour y être
taillé et sculpté, avant de revenir en
Europe…
Chaque année à
Caunes Minervois se tient
la fête du marbre.
Les parois de marbre visibles dans les
carrières sont les couches correspondant au passage des
tsunamis. En effet, la mer, chaude, arrivait jadis
jusqu’ici. Le rouge est formé par une oxydation du fer et le
blanc par des nautiles, coquillages fossilisés. Le marbre
s’est ainsi formé à l’ère géologique du dévonien, il y a
environ 400 millions d’années.
|
D'ou vient
le culte de Notre Dame du Cros ?
Selon une légende, l'emplacement de
Notre Dame du Cros n'est pas dû au hasard. Le sanctuaire serait
situé près d'une source miraculeuse au sud et à l'entrée
des gorges du Cros.
En effet, à proximité de l'église jaillit une
source dont l'eau aurait la propriété d'enrayer les fièvres.
Ce fut à la suite d'une guérison miraculeuse que trois petites
chapelles en pierres sèches furent construites au‑dessus de
la source.
On peut d'ailleurs admirer aujourd'hui à
l'est de l'église et au‑dessus de la fontaine, une arcade et
le début d'une autre, taillées dans la falaise. À
l'origine, ces trois arcades appelées 'Las Capeletos'
contenaient les statues de
la Vierge, de
Saint Joseph
et de Saint Jean. La tradition veut que ce soit là
l'origine de la dévotion du Cros. Il existe sous ces chapelles une petite grotte avec une table en pierre. Dolmen
druidique ou autel ? Personne ne le sait, mais selon la
légende, on y célébrait le culte des trois niches, avant de
construire finalement une église de l'autre côté de la
berge.
Voici enfin la légende au Cros qui n'est pas sans
rappeler celle de
la
Vierge Noire de ND de
Marceille :
Selon cette légende, la statue de la
Vierge que l'on voit, fut trouvée dans
un rocher ; on la transporta d'abord à
Caunes mais toutes les nuits elle
disparaissait après avoir bouleversé la
chapelle provisoire où on la déposait.
On la retrouvait ensuite dans la
campagne. Quelqu'un eut l'idée de jeter
en l'air un marteau de marbrier et il
alla tomber au Cros au lieu où l'on
bâtit la chapelle de l'ermitage... |
Aujourd'hui,
le site de Notre Dame du Cros accueille tous les ans un pèlerinage
traditionnel le 8 septembre,
jour de la nativité
de la Vierge. Selon une autre source, le culte de Notre Dame du
Cros aurait pris la place de la déesse païenne Cybèle,
déesse du matinale...
|
Un lourd passé
Notre Dame du Cros
fut fondée en l'an 900 ap. J.‑C. ce qui est confirmé
par une bulle du
pape Gélase II en
1118. D'origine romane, elle fut restaurée
plusieurs fois au
XVIIIe puis au
XIXe
siècle.
Mais la localité de
Caunes porte un lourd passé du fait de
la
croisade contre les albigeois qui vit
en
1227 Pierre Isarn, évêque
cathare du Carcassès, brûlé vif à Caunes.
Il faudrait aussi parler de
Minerve, un village situé à 8 km de ND du Cros,
capitale historique du Minervois, et qui évoque les
cathares. Juchée sur son pic rocheux, la petite
cité fortifiée fut le bastion de cette nouvelle religion qui dura deux siècles, avant que le pape Innocent III ne déclenche la sanglante croisade des albigeois.
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Minerve et le reste de son château (Aude)
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Stèle commémorative
en hommage aux cathares
et à leurs martyres
|
À la suite du massacre de Béziers
en juillet 1209,
Minerve devint un refuge pour de nombreux cathares.
Le château appartenait au Vicomte Guillaume de Minerve
protecteur des cathares du pays. La forteresse est sur un site
imprenable, car entourée par des ravins de 40 m
de haut en plan vertical au‑dessus du lit asséché de la
Cesse. Le siège de Simon de Monfort débuta le
15 juin 1210 et la capitulation de la forteresse
intervint le 22 juillet 1210 après 5 semaines de siège. Les 140 cathares
de Minerve furent sommés d'abjurer leur religion et la majorité
d'entre eux refusèrent. Ils se jetèrent d'eux‑mêmes dans le
bûcher que les croisés avaient dressé dans le ravin de la Cesse.
Une stèle commémorative se dresse aujourd'hui à l'endroit même
du sacrifice, qui est aussi un hymne à la tolérance. |
Pourquoi ND du Cros est liée à Rennes‑le‑Château ? |
ND de Marceille
et ND du Cros
sont intimement liées à une partie de l'histoire de
Rennes‑le‑Château. Quels sont ces liens ? |
Des attaches sentimentales lient l’abbé
Boudet à Notre Dame du Cros
ND du Cros revêt une importance toute
particulière pour l'abbé Henri Boudet. En effet, ce fut
un lointain parent à lui, Antoine
Boudet, qui en rachetant le sanctuaire, sauva ce dernier de la
destruction révolutionnaire. Mais surtout, durant 4 ans entre
1862 et 1866, Henri Boudet y termina son vicariat
(classes de prêtre). Ce f ut pendant cette période que
probablement son destin bascula, puisqu'il rencontra le
chanoine
Gaudéric Mèche.
Pour mémoire, ce dernier fut aumônier
à Notre Dame de Marceillle
de 1815 à
1838
, date à laquelle il fut remplacé par
Henri Gasc.
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Boudet cite Notre Dame du Cros dans "La Vraie
Langue Celtique"
Dans son
livre "La Vraie Langue Celtique",
l'abbé Boudet cite
Notre Dame du Cros à la fin de son chapitre sur la
fontaine de
Notre Dame de Marceille.
Il est clair que ceci est dans l'intention de rapprocher ces
deux sanctuaires pour mieux faire comprendre au lecteur leur
importance.
C'est ainsi que
l'on peut lire en page 280
de son livre :
Nous pourrions citer
encore le nom d'un autre sanctuaire de nos
contrées, situé près de caunes et appelé
Notre‑Dame du
Cros. Là aussi, au‑dessus de la
magnifique fontaine qui jaillit au pied de
la montagne, on avait marqué une croix –
cross, croix –. Une statue de la Sainte
Vierge a, plus tard, remplacé la croix
auprès de la fontaine, et le sanctuaire bâti
à peu de distance, a reçu le nom de
Notre‑Dame du Cros ou Notre Dame de la
Croix.
Extrait de "La Vraie Langue
Celtique" par Henri Boudet 1886
|
|
Le
Serpent Rouge
cite clairement Notre Dame du Cros
A la 7ème
strophe du texte, on peut lire :
De celle que je désirais libérer,
montaient vers moi les effluves du parfum qui
imprégnèrent le sépulcre. Jadis les uns
l'avaient nommée : ISIS, reine des sources
bienfaisantes, VENEZ A MOI VOUS TOUS QUI
SOUFFREZ ET QUI ETES ACCABLES ET JE VOUS
SOULAGERAI, d'autres : MADELEINE, au célèbre
vase plein d'un baume guérisseur. Les initiés
savent son nom véritable :
NOTRE DAME DES CROSS. |
Or comme le dit Boudet, Notre Dame des Cross est aussi
Notre Dame de la Croix ou
Notre Dame du Cros.
Si l'on suit cette strophe à la lettre, il est clair que
l'auteur du
Serpent Rouge
donne à
Notre Dame du Cros une
signification initiatique particulière. Il faut peut‑être y
voir un lieu que seuls des initiés peuvent apprécier et comprendre...
Il faut noter aussi que l'on parle dans le Serpent Rouge
de Notre Dame des Cross qui veut aussi dire
Notre
Dame des Croix. Y aurait‑il
plusieurs croix ?
|
Gaudéric Mèche, aumônier de ND de
Marceille, fut aussi aumônier de ND du Cros. Il connut aussi
un jeune prêtre... Henri Boudet.
Gaudéric Mèche fut
de 1815 à
1838 aumônier à
ND de Marceille soit environ
23 ans. Son histoire fut remarquée pour avoir
facilité de façon très mystérieuse la rénovation du
sanctuaire de Limoux. En 1838, il quitta contre son
gré ND de Marceille et devint chanoine à
ND du
Cros.
Mais à partir du
16 juin 1862,
un évènement crucial pour l'histoire de Rennes‑le‑Château va
se dérouler ici, car ce fut à cette époque qu'il reçut en
formation un tout jeune prêtre :
Henri Boudet.
|
Le Père Joseph Chiron, dont une partie est
enterrée à ND du Cros, est représenté dans l'église de
Rennes‑le‑Château.
Comme nous le verrons par la suite,
une coïncidence indéniable scelle la liaison entre
l'église de Rennes‑le‑Château
et donc
Saunière avec un certain
Père
Joseph Chiron
enterré à Notre Dame du Cros. En effet nous
retrouvons son visage sur la statue de
Saint Antoine ermite
et à la
station XIV
(lire "Le secret
dérobé ‑ Franck Daffos)
Coïncidence ? Non, car
Gaudéric Mèche connaissait le
Père Chiron. Avaient‑ils un secret en commun ?
On peut affirmer aujourd'hui que oui compte tenu des fonds aux origines occultes que le Père Chiron disposait...
|
Le Père Joseph Chiron
(1797‑1852) |
Pour comprendre l'importance de
Notre
Dame du Cros dans l'énigme de Rennes, il faut
comme nous le suggère Boudet, suivre la trace de
Joseph Chiron... |
Qui fut Joseph Chiron ?
Né à
Bourg‑Saint‑Andéol dans l'Ardèche, le 19
novembre 1797, il est le fondateur de
la Congrégation Sainte‑Marie de l'Assomption.
Son parcours atypique et méconnu fait
partie des grands bienfaiteurs du XIXe
siècle. Il est pourtant totalement inconnu et absent des
livres d'Histoire...
Issu d’une famille nombreuse
et modeste, il manifesta très tôt des penchants mystiques et
religieux. Rapidement, il s'orienta vers
le séminaire de Viviers où il rencontra
l'abbé Vernet.
Coïncidence, ce dernier reçu une formation au séminaire de
Saint Sulpice à Paris.
|

Le Père Joseph Marie Chiron vers
1843 et son lourd Crucifix de 1m de haut qu'il ne quitta
plus jusqu'à sa mort
|
L’abbé Vernet vouait une véritable
vénération pour Agnès de Langeac (1602‑1634),
supérieure des Dominicaines et surtout très proche d’Olier
qui fonda St Sulpice en 1646. Les
liens entre Viviers et le disciple de Vincent de Paul qui
connut si bien Nicolas Pavillon furent en effet
nombreux : Agnès de Langeac avait une sœur, elle aussi
dominicaine, qui séjourna au couvent de Viviers, et chose
inconnue de la plupart : l’abbé Olier eut une apparition de
la Vierge qui lui aurait recommandé de «prier pour l’abbé de Pébrac » proche de Langeac. (Extrait Franck Daffos)
Inspiré par une foi profonde, Chiron
vit sa carrière s'accélérer : sous‑diacre le 21 décembre 1822, diacre le 15 mars 1823
et prêtre le 27 avril de la même année.
Il devint curé de la paroisse de
Saint‑Martin l’Inférieur le 6 juillet 1823.
Très vite, grâce à un charisme hors du
commun, il créa le 25 novembre 1824 la
Congrégation Sainte‑Marie de l’Assomption, soumise à la
règle de
Saint‑Augustin. Les quelques jeunes filles du
pays qu'il détermina à se consacrer à la Sainte Vierge
furent baptisées
"les Saintes Marie". Et
Adélaïde Bernard (1801‑1839) devint, sous le
nom de
Mère Agnès (nom donné par Chiron en hommage à
Agnès de Langeac), la première Supérieure.
Le
1er janvier 1827, le
Père Chiron fut nommé aumônier de la prison de
Privas dans l'Ardèche.
Or cette prison, comme
beaucoup d'autres à cette époque, faisait cohabiter les
délinquants et les aliénés.
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Joseph Chiron à 44 ans
(Archives Gandon)
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À partir d'une idée du
R.P.
Magallon et du
frère Hilarion, il créa avec
les Saintes
Marie
venues le rejoindre, le
premier asile Sainte Marie
pour les femmes aliénées.
C’est ainsi que le
1er mai 1827 naquit l’Hôpital
Sainte Marie de Privas. Mais son idée fit du chemin, et
en 1836
l’Hôpital Sainte Marie de Clermont‑Ferrand (Puy‑de‑Dôme) ouvrit ses portes.
Le Père Joseph Marie Chiron est donc
l'un des trois
hommes d'Église qui fondèrent les maisons
d'aliénés en France au
XIXe siècle, avec le très fantasque
frère Hilarion et le R.P. de Magallon.
Le Père Jean de Magallon fut le refondateur
de l’Ordre de St Jean de Dieu supprimé à la Révolution.
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Joseph‑Xavier Tissot (1780‑1864)
dit Frère
Hilarion
Après avoir entrepris des études de médecine
à Paris, Joseph Tissot
découvrit la médecine mentale à l'occasion de son
hospitalisation à la Maison de Charenton. Il y séjourna plus
de 4 ans de
1810 à 1814. À sa sortie, Tissot se retira à la
Trappe d'Aiguebelle où il découvrit la vie de Saint
Jean‑de‑Dieu et devint
Frère Hilarion. Il mena ensuite une vie
d'ermite à Rochegude dans la Drôme. Au printemps
1819 il rencontra R.P de Magallon, ce
qui le décida définitivement de servir les aliénés et de
restaurer l'Ordre de la Charité qui disparut sous la
Révolution. Frère Hilarion s'engagea comme simple
infirmier à l'hôpital Saint‑Lazare de Marseille avant d'être
exclu de l'Ordre.
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Joseph Tissot (1780‑1864)
dit Frère Hilarion
|
Il entreprit ensuite, entre 1821 et 1827, et grâce à
son extraordinaire pouvoir de persuasion, la fondation de 9
hospices ou asiles d'aliénés en Lozère, dans l'Ain, le
Rhône, le Nord, en Bretagne, en Auvergne et en Corrèze. En
mai
1827, il ouvrit deux maisons à Paris pour les idiots et
les aliénés, l'une rue Saint‑Hippolyte, l'autre rue de la
Glacière. 3 ans plus tard en 1830, il fonda l'asile
de Clermont‑Ferrand, puis l'asile de La Sallette (Corrèze)
et Leyme (Lot) en 1835. Ces établissements sont pour
la plupart aujourd'hui en service de soins psychiatriques. |
Le dévouement du
Père Chiron à
l'Hôpital de Privas fut fortement remarqué. Il
accompagnait même à l’échafaud des grands criminels, comme les
fameux "aubergistes de Peyrebelle" (juin 1833)
qui avaient pris pour habitude de massacrer en famille leurs
clients pour mieux les dévaliser. L’affaire très célèbre à
l'époque est encore aujourd'hui souvent reprise au cinéma.
Mais le
Père Chiron possédait
une caractéristique épuisante pour ses proches. Il avait la
bougeotte, et toute sa vie ne fut que déplacements et marches
interminables.
|
1830 ‑ Une année charnière
C'est ainsi que dans cette frénésie de
parcourir les chemins afin d'œuvrer pour la mission de sa
vie, l'année 1830 marqua un changement dans son
comportement. Alors que jusque là le Père Chiron
présentait tous les signes d'une pauvreté exemplaire,
certains faits à cette époque montrent qu'il détenait tout
d'un coup des ressources pécuniaires conséquentes permettant
de poursuivre sereinement son œuvre.
Un exemple soulevé par
Franck Daffos est celui de l’épisode de
la fondation de la maison de Clermont‑Ferrand en
1835.
Le choix s’était d’abord porté sur un ancien château, «Le
bois de Cros», une ancienne propriété saisie comme bien national
lors de la tourmente révolutionnaire à un émigré, lieutenant
général de Louis XVI Joachim‑Charles de Montaigu, vicomte de Beaume. Joseph Chiron avait pris le domaine en
location avec promesse de vente, mais des problèmes de
copropriété insolubles puisque hérités de la Révolution vont
pousser le prêtre à tenter d’acheter ailleurs : il fera
alors une offre ferme de 120 000 francs comptant,
une somme énorme pour l’époque, au propriétaire de l’ancien
monastère de St‑Alyre tout proche. La tractation secrète
n’aboutit pas, mais laissèrent perplexe les historiens de la
Congrégation Sainte‑Marie bien des années après la mort de
son fondateur lorsqu’ils purent mettre la main sur sa volumineuse correspondance.
|
Le Père Chiron poursuit son œuvre
et ses
investissements...
En
1839, le
Père Chiron installa à
La Sallette (Corrèze) une communauté de
frères servants dans les bâtiments que
Frère Hilarion avait réservés
7 ans
auparavant pour la création d'un asile en
1831. C'est ainsi que
les frères de
Sainte‑Marie de L'Assomption
soignèrent les hommes aliénés. Un siècle plus tard,
leur communauté devint l'Ordre de
Saint Jean de Dieu.
Il finit enfin par ouvrir l’Hôpital Sainte Marie dans
le Puy en
1850.
Mais Joseph Chiron ne s'arrêta pas là.
Il poursuivit avec la fondation de l’ermitage du Mont
Toulon à Privas dans l'Ardèche en 1842.
L’entrepreneur ne sera payé que 5 ans plus tard et on
prétexta un héritage familial pour solder la dette.
De nos jours, 5 établissements
psychiatriques dépendent de l'Association Hospitalière
Sainte‑Marie:
Privas (Ardèche), Clermont‑Ferrand (Puy‑de‑Dôme), Montredon
(Le‑Puy‑en‑Velay, Haute‑Loire), Nice (Saint‑Pons,
Alpes‑Maritimes) et Cayssiols près de Rodez (Aveyron)
|
Le Père Joseph Chiron devient ermite
Pour une
raison incompréhensible, alors que sa mission progressait à
grands pas, le Père Chiron quitta sa
Congrégation de Privas.
Le 24 février 1843
à l’aube et sans prévenir, il reprit la route après
avoir laissé derrière lui une lettre sur le rebord d’une
fenêtre. L'infatigable marcheur va alors effectuer un
périple impensable : Valence, Avignon, Nîmes, Montpellier,
Béziers et Narbonne, pour finalement aboutir un mois plus
tard à
l'Ermitage de Galamus
le
24 mars
1843
à côté de
St‑Paul de Fenouillet.
Le 27 mai 1843, il reçut l'autorisation
de Mgr Saunhac‑Belcastel, évêque de
Perpignan, de s'y installer.
Le Père Joseph Chiron se retira
alors en tant qu'ermite anonyme sous le nom de
Père Marie. Ce lieu extraordinaire par son
emplacement, creusé dans la roche à flanc de falaise, est en
effet, tout à fait propice à la vie recluse d'un ermite.
"La sainte pauvreté
doit toujours nous être plus chère que
toutes les richesses de la Terre"
R.P. Chiron
(Lettre du 19 avril
1842 à la Communauté de Clermont)
|
|
L'arrivée de
Père Marie fit retrouver à
l'Ermitage de Galamus la tradition franciscaine.
Il y rencontra
Frère
Pierre, et sur le sentier qui mène à l'ermitage il érigea
un chemin de croix dont il ne subsiste aujourd'hui qu'un
petit oratoire. C'est ici qu'il prit
l’habitude de toujours porter avec lui sur
son épaule gauche un grand Crucifix de 1 m de haut, cadeau de
l’un de ses bienfaiteurs historiques de Lyon,
M. Laporte.
Joseph Chiron ermite à
l'ermitage de Saint Antoine de Galamus. On comprend
alors pourquoi la statue de
Joseph Chiron en ermite
de
Saint Antoine
se trouve dans
l'église de Rennes‑le‑Château,
un indice qui trouve ici toute sa
justesse...
|

L'ermitage de Galamus
|
Mais les
conditions de vie étaient certainement très dures.
L'ermitage, logé dans
les gorges de Galamus
non loin du
Bugarach, n'est pas épargné par la
rudesse du froid de l'hiver et par l'humidité ramenée par la
rivière qui coule aux creux des falaises.
Frère Pierre,
malade, creusa sa tombe de ses propres mains. Il mourut de
faim et de froid
durant l'hiver
1870
et sa tombe est aujourd'hui visible sur le chemin d'accès à
l'ermitage.
Mais le
Père Marie ermite à Galamus n'était pas ermite dans
l'âme. Il continua dans cette période à entretenir de
nombreuses relations lyonnaises qui étaient à l'époque de
grandes personnalités religieuses et bourgeoises. Mais parmi
toutes ces relations, l'une s'est faite plus discrète que
les autres par les historiens : Un certain
Mr Pasquier
qui était orfèvre et spécialiste dans la reconversion
d'objets précieux...
|
De nouveau sur
la route
Le
Père Chiron avait décidément la bougeotte, et cet état de caractère
était incompatible avec une vie d'ermite. Il fuit les gorges
de Galamus en
mai 1845
et continua son œuvre dans la région de
Perpignan. Il acheta alors
les ruines de l’ancien Prieuré
Saint‑Jacques de Caramola qu’il rebaptisera Monastère
Sainte‑Croix, situé sur la commune de Vernet‑les‑Bains. Quatre
compagnons d'infortune qui l'accompagnèrent dans ces
épreuves succomberont de fatigue.
Le 6 juin 1846, il reprit la route,
mais ce fut en malade qu'il retourna à sa Congrégation de
Privas. Se croyant agonisant, il y fit son testament, mais
heureusement il guérit. Entre temps, sa Congrégation a
prospéré et il se retrouva avec un patrimoine
immobilier important. Mais le père Chiron, ne tenant pas en
place, reprit la route vers Clermont‑Ferrand, la Sallette, puis le Roussillon et en février 1847,
Galamus, puis Sainte‑Croix. En
août 1849, on le retrouva chez sa famille à
Bourg‑St‑Andréol où la population l’accueillit
comme un saint : en 3 jours il bénira et distribuera plus de
5000 médailles...
Le 8 août 1849, il retourna à Privas
puis à
Lyon. C'est à cette époque qu'on le vit
accompagné d'un demi‑fou : Antoine Gay (1790‑1871).
Reconnu possédé par le démon en
1843, il avait été envoyé pour traitement chez
les fous à la Congrégation Sainte‑Marie avant que
Chiron
ne le rencontre à Privas
fin 1849. Cette période entre
1849 et 1850 fut pour Chiron certainement la
plus trouble. Chiron et Gay formaient alors un duo
extravagant comme le souligne Franck Daffos :
A Lyon, ils logent chez un prêtre
illuminé, l’abbé Nicod, curé de la Croix Rousse,
qui professe le retour imminent du fils de Louis
XVI. On les retrouve ensuite, mais hélas sur les
registres de gendarmerie, en septembre 1850 pour
un mémorable (d’après les témoins) voyage à La
Sallette pour le 4ème anniversaire de
l’apparition mariale. Ils y rencontrent les deux
jeunes voyants, Mélanie Calvat et Maximin
Giraud, mais plusieurs scandales de Gay
nécessitent une intervention de la gendarmerie.
Amenés sous bonne escorte à Grenoble, ils seront
bientôt expulsés de la ville. |
Mais la hiérarchie épiscopale ne vit pas d'un bon
œil toutes ces agitations. L’évêque de Tulle voulait enfermer
Antoine Gay, et l’évêque de Viviers voulait
destituer
Chiron s’il ne se sépare pas définitivement de
son compagnon de route. Joseph Chiron l'abandonna
finalement entre de bonnes mains à Lyon en
janvier 1851.
Antoine Gay y resta jusqu’à sa mort, le 13 juin
1871, à l’âge de 81 ans. Mais toutes ces péripéties eurent un prix pour
Chiron. Il fut obligé de céder sa Congrégation, poussé
par sa hiérarchie qui l'avait mis en place.
Il repartit alors dans une de ses dernières
propriétés,
l’ermitage de St‑Pierre‑del‑Vilar, dans la
commune de Claira en Pyrénées‑Orientales. Il y
rencontra le Père Eugène de Potriés
et durant un an il s'imposa ascèse et mortifications.
|
Une décision lourde de conséquences
À
55 ans, la vie de
Joseph Chiron accumulait fatigue et usure.
Affaibli par sa vie érémitique, ses privations et ses
longues marches, il ressentit certainement une fin proche.
Courant
1852 il prit alors la
décision de partir pour ND du Cros et il y arriva
avec le
Père Eugène de Potriés
le 18 juin 1852. L'objectif officiel
était de fonder un ermitage avec l'aide de Mgr de Bonnechose.
Mais ce n'est pas le hasard si
Chiron, sentant sa fin proche, voulu rejoindre
ND du Cros. Car en fait son objectif était de rencontrer
à nouveau le chanoine
Gaudéric Mèche qu'il connut
20 ans plus tôt
vers 1830 à l'Hôpital de Limoux.
Était‑ce pour confier à
Mèche un
important message ? Voulait‑il tout simplement revoir son
mécène avant de mourir ? Nous ne le saurons peut‑être
jamais. C'était en 1852...
|
Une mort théâtrale
Épuisé, le
Père Joseph Chiron dit
Père Marie, mourut finalement en odeur de sainteté le
27 décembre 1852 et ce fut réellement dans les
bras de
Gaudéric Mèche qu'il
rendit son dernier soupir.
On imagine facilement l'émotion que
Mèche dût ressentir dans ces instants douloureux.
L’abbé Montanié, curé doyen de Caunes
et Eugène de Potriés
l’assistèrent dans son agonie.
Ce fut ensuite
avec l'autorisation de Mgr de Bonnechose qu'il
fut inhumé sous le porche d'entrée du sanctuaire de ND du
Cros.
Ses obsèques eurent lieu le
30 décembre 1852 à 11h. Une foule innombrable
rejoignit le sanctuaire dès l’annonce du décès et sa tunique
fut partagée entre les fidèles.
|

La sépulture de Joseph Chiron
sous le porche de ND du Cros
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Aujourd'hui, sous la dalle mortuaire, seul
son avant‑bras droit est présent. Les restes de sa dépouille
furent transférés à la maison mère de sa Congrégation à Privas
dans l'Ardèche, le 4 août 1912, sous la responsabilité
personnelle du Vicaire Général Gustave Cantegrel de
l'évêque de Carcassonne Mgr de Beauséjour. |
(*) Ne cherchez pas de traces de
Gaudéric Mèche dans le livre de Jacques Rivière "Les
ermites de Galamus" (éd. Bélisane), il n'y en a pas. Ceci est
simplement dû au fait que les premières recherches de
Jacques Rivière ainsi que d'autres auteurs se sont
orientées vers le curé de l'abbaye de Caunes
(l'abbé Falguères) au lieu de
l'aumônier de ND du Cros (Gaudéric Mèche). Ceci a
été avéré par l'acte de décès de Mèche
indiquant qu'il fut effectivement aumônier à la chapelle
du Cros. C'est le trait d'union qui permit à
Franck Daffos de relier une grande partie de l'histoire avec
Notre Dame de Marceille (voir "Le secret dérobé") |

La sépulture de Joseph Chiron à ND du Cros
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Le 9 septembre 1912, le Vicaire général du diocèse de
Viviers (Ardèche) Deschanel, procéda au nom de son
évêque Mgr Bonnet à la reconnaissance officielle des
ossements de Joseph Chiron. Ils sont aujourd'hui
conservés à la maison mère
de sa Congrégation
Sainte Marie de l'Assomption
à Privas. À l'entrée de cette maison se
trouve une statue sur pied de Joseph Chiron qui rend
hommage au fondateur.
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Le projet de canonisation du Père Chiron
Pour comprendre cet épisode qui en dit
long sur les dessous de l'affaire, il faut se rappeler qu'en
1852, date du décès du
Père Chiron,
l'évêque de Carcassonne était le très célèbre
Mgr de Bonnechose. Or à cette date, les impératifs de
sa carrière l'obligeaient à prévoir de quitter son siège
épiscopal de l'Aude. Il finit, contraint et forcé à se
déplacer à Rouen en
1855 où il devint sénateur du Second Empire et
Cardinal. Sa carrière fut d'ailleurs prestigieuse puisqu'il
fut aussi un interlocuteur privilégié entre le Saint‑Siège
et l'Empereur Napoléon III.
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Le cardinal de Bonnechose ‑
Photo
RMN
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Mgr de Bonnechose (1800 ‑ 1883)
Archevêque de Carcassonne de 1848 à
1858, puis archevêque de Rouen de 1858 à 1883
Henri Marie
Gaston de Bonnechose naquit à Paris le
30 mai 1800.
Sa mère étant hollandaise, il s'orienta d'abord vers la
religion protestante puis à 18 ans, il se convertit au
catholicisme. En
1822, après des études de droit, il devint
avocat devant la Cour Royale de Paris. Une carrière rapide
se poursuivit alors avec dans l'ordre : substitut aux
Andelys (où naquit Poussin) puis à Rouen, procureur du roi à
Neufchâtel‑en‑Bray, substitut du procureur général à
Bourges, avocat général à Riom et enfin, à
29 ans,
premier avocat général à Besançon.
il abandonna la magistrature sur les
recommandations de Mgr de Rohan et entra au Séminaire.
Ordonné prêtre en 1833, il enseigna à Strasbourg. En
1844, il fut nommé Supérieur de l'Établissement
Saint‑Louis des Français à Rome et curé de son église. En
1847, il devint
Évêque de Carcassonne, puis
d'Évreux en
1854 grâce au
Pape Pie IX et à
Napoléon III.
Interlocuteur
privilégié de l'Empereur pour les nominations épiscopales,
il fut muté à Rouen le
21 février 1858 comme
successeur de Mgr Blanquart de Bailleul.
Nommé
cardinal sur proposition de l'Empereur fin
1863 il resta très actif. Habile négociateur durant
l'occupation prussienne en
1870, ce fut aussi un
grand entrepreneur. Il obtint par
Mac‑Mahon l'achèvement de la flèche de la Cathédrale
de Rouen en
1875, la construction de l'église Saint‑Clément
de Rouen et de plus de 60 nouvelles églises.
Il mourut le
28
octobre 1883
épuisé. Il fut inhumé dans la chapelle
Saint‑Pierre‑et‑Saint‑Paul de la Cathédrale de Rouen en un
monument où il est représenté à genoux, en prière.
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Donc en
1852, tout était en place
pour procéder à la Béatification puis à la
Canonisation du
Père Chiron. En effet, le
parcours du fondateur des hôpitaux psychiatriques était
exemplaire et sa conversion en ermite ne fit que renforcer son
image de "Serviteur de Dieu".
Joseph Chiron avait de plus
un charisme et une renommée sans égal. Mort en odeur de
Sainteté, son introduction à la
Béatification puis à la
Canonisation était inévitable et ses fervents
admirateurs le savaient... |
Béatification et canonisation ‑
Quelques définitions :
La Béatification
est l'acte par lequel le Pape place une personne au rang des
"Bienheureux" (en latin beati), et
la Canonisation
celui par lequel il est inscrit sur la liste officielle
(canon) des Saints.
But de la Béatification et de la
Canonisation :
Pour l'Église, il s'agit de
proposer en exemple au peuple chrétien, le témoignage d'un
de ses membres défunts en tant que Serviteur de Dieu. Le
culte public du Bienheureux ou du Saint se traduit par
l'attribution d'un jour de fête au calendrier et par la
possibilité d'exposer des images et des reliques dans les
églises. Le Bienheureux ou le Saint peut être pris comme
patron (de personnes, de paroisses, etc.), le tout dans les
limites définies par l'autorité ecclésiastique.
Différence
entre Béatification et Canonisation :
La différence
réside dans le degré d'extension du culte public. Pour le
bienheureux (Béatification)le culte est limité là où le
Saint‑Siège le prévoit. Pour le Saint, le culte est autorisé
et prescrit partout dans l'Église universelle.
La canonisation est une sentence définitive et irréformable
sur la sainteté de la personne. C'est une proclamation qui
engage l'autorité suprême du pape, et qui touche au dogme de
l'infaillibilité pontificale.
Pour aboutir à une Béatification ou
à une Canonisation il faut démontrer :
1) Le rayonnement spirituel du Serviteur
de Dieu après sa mort : c'est à la fois un signe de sa
participation à la sainteté de Dieu et l'assurance que son
exemple est accessible et bienfaisant au peuple chrétien.
Les miracles qui peuvent lui être attribués sont d'une
grande importance.
2) Son martyre
(mort subie par fidélité à la foi) ou ses vertus chrétiennes
(foi vivante reconnue)
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Un rebondissement inattendu...
C'est ici qu'il se passa un évènement
incompris pour les croyants et les admirateurs de
Joseph
Chiron à l'époque. Alors que la Béatification, étape
indispensable pour la Canonisation devait être ratifiée par
l'évêque de Carcassonne et donc par
Mgr de Bonnechose,
se dernier
refusa avec vigueur d'apposer sa signature.
Ce fait rarissime dans l'histoire de
l'église resta inexpliqué,
Mgr de Bonnechose
ayant refusé d'y ajouter tout commentaire. On peut
comprendre alors le désarroi des fidèles qui ont dû
certainement maudire un temps la hiérarchie cléricale
locale... Comment pouvait‑on refuser à ce saint homme un
hommage de l'église qu'il a tant aimé ?
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Comment interpréter le refus de Mgr de
Bonnechose ?
L'interprétation est assez simple si
l'on possède certains éléments du puzzle.
Il faut d'abord savoir que pour des raisons obscures, la
Congrégation
Sainte Marie de l'Assomption créée par le Père Chiron était florissante.
Son soutien financier était sans aucun doute accordé et
organisé par
Gaudéric Mèche.
Mais quelle était la source de financement de ce dernier ?
Puisait‑il dans la seconde cache à Notre Dame de Marceille ?
Était‑il alimenté par Mèche puis par
Henri Gasc qui fut
son successeur comme aumônier à ND de Marceille ?
Nous ne le savons pas, mais un fort soupçon plane...
Voici donc peut‑être une explication
de la mort de Joseph Chiron dans les bras de
Gaudéric Mèche. Ce dernier étant quelque part
son bienfaiteur et son mécène, un étrange lien de forte
fraternité devait exister entre les deux hommes...
Mgr de Bonnechose
connaissait‑il les extraordinaires et inexpliquées
ressources financières du chanoine
Gaudéric Mèche ?. Connaissait‑il aussi
l'extraordinaire et tout aussi inexpliquée réussite de la
Congrégation Sainte‑Marie de l'Assomption
fondée par le Père Chiron ? En le voyant venir mourir
ainsi dans les bras de
Mèche, Mgr de Bonnechose ne pouvait que soupçonner une relation occulte, la dernière rencontre entre le financier et le bienfaiteur de
la
Congrégation.
Préférant ne pas
devenir complice d'un scandale financier dont il ne
maîtrisait pas la provenance, il prit donc la décision de
mettre son veto à la Béatification de
Joseph Chiron. On comprend aussi pourquoi il
évita toute explication et donc toute publicité...
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Conséquences...
Il faut savoir que sans Béatification ou Canonisation
il est impossible de déposer des reliques dans une église ou
dans un sanctuaire. Cette règle n'a pu échapper à la
dépouille du
Père Chiron.
C'est pourquoi, certainement en guise
de protestation contre la hiérarchie diocésaine et contre
cette flagrante injustice, le chanoine
Mèche prit la
décision d'inhumer Joseph Chiron sous le porche
d'entrée de ND du Cros.
Lorsqu'en
1912 la décision fut
prise de transférer son corps à
Privas (Ardèche), un compromis fut trouvé en
laissant sur place son avant‑bras dans un précieux coffret.
L'idée était bien sûr de rendre hommage à
Gaudéric Mèche
que Joseph Chiron
voulut revoir avant de mourir.
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Le porche d'entrée et la sépulture
du Père Chiron
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En agonisant auprès de
Mèche , le
Père Chiron
se raya finalement sans le savoir de la liste des Saints... Justice fut
rendu quelques années plus tard par
Henri Boudet en le
statufiant dans l'église de Rennes‑le‑Château.
D'après "Le Secret
Dérobé" de Franck Daffos
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A droite, la statue
de Joseph Chiron
telle qu'on peut la voir
à l'hôpital Sainte
Marie de Privas
|
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Et
aujourd'hui, où en sommes‑nous ?
Depuis
1912,
l'incompréhension parmi les fidèles demeure intacte. Du côté
des instances religieuses, les ordonnances se suivirent pour
demander un complément d'enquête. Un tribunal fut même
constitué le 18 avril 1936 pour instruire le procès
diocésain. Des commissions furent organisées pour retrouver
des écrits et des témoins. Le
Pape Pie XII confirma
même le
22 mai 1953 les écrits du
Père Chiron, ce qui est un pas considérable vers sa
béatification. Et pourtant, depuis, plus rien. Le temps aura
eu raison de la mémoire des hommes, car qui se rappelle
aujourd'hui de Joseph
Chiron ?
Voici donc un homme qui passa toute sa
vie au service des autres et qui fut jugé sans explications
par sa propre hiérarchie. Il fallait certainement un motif
particulièrement important pour bloquer les procédures
jusqu'au niveau du pape...
|
L’hôpital spécialisé Sainte Marie,
occupe aujourd'hui une place importante dans le bassin de
Privas. Ce centre hospitalier veut être au service des
personnes les plus fragiles de notre société. Il est une
source d’emplois pour Privas, pour les environs et même pour
tout le département.
De nos jours,
cinq établissements
psychiatriques dépendent de l'Association Hospitalière
Sainte‑Marie: Privas (Ardèche), Clermont‑Ferrand
(Puy‑de‑Dôme), Montredon (Le‑Puy‑en‑Velay, Haute‑Loire),
Nice (Saint‑Pons, Alpes‑Maritimes) et Cayssiols près de
Rodez (Aveyron)
|

L'Hôpital Sainte Marie à Privas
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Pourquoi le Père Joseph Chiron
est‑il lié à
Rennes‑le‑Château ?
Nous savons aujourd'hui que
Joseph
Chiron est lié à
Gaudéric Mèche, ce dernier étant lié à
Gasc
puis à
Boudet. Mais ces liens
n'auraient pas été faciles à mettre en évidence sans
l'ingéniosité de l'abbé
Boudet. En effet, il est passionnant de retrouver le
Père Chiron déguisé en
Saint Antoine ermite
et en habit des franciscains dans l'église de Rennes‑le‑Château.
Or ce n'est pas tout. On le retrouve
également dans la fameuse
station XIV depuis
1897 où il porte
Jésus
par son torse.
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Saint Antoine ermite
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Saint Antoine ermite en habit des
franciscains (à gauche) et la station XIV dans l'église de
Rennes‑Le‑Château
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Il faut noter ici que cette statue de
Saint Antoine ermite en
Joseph Chiron est sans doute unique.
Boudet a‑t‑il passé une commande spéciale à la maison Giscard ?
Ou bien cette dernière était‑elle bien renseignée sur ce
personnage ? Saunière était‑il au courant du message ?
Ces questions sont en tout cas posées...
Pourtant dans le contrat concernant la
commande du statuaire signé entre Saunière et Giscard
ne figure aucune particularité excepté que l'on y parle de "modèles
décidés".
Sept statues, toujours
en terre cuite de 1 mètre 30 centimètres de
hauteur chacune, décoration extra‑riche,
peintures moyen âge et en plein, Pierreries,
yeux émaillés. Nom des Sts Vierge mère avec
enfant Jésus, Saint Joseph avec enfant
Jésus, conformes l'un et l'autre au modèle
désigné. Saint Antoine de Padoue avec Enfant
Jésus debout sur le livre. Sainte Marie‑Madeleine patronne de la Paroisse.
Saint Antoine
ermite second patron. Sainte Germaine
avec deux agneaux et St Roch. Toutes ces
statues sont
conformes aux
modèles décidés et irréprochables
quant à l'exécution.
Extrait du contrat de
commande du statuaire entre Saunière et
Giscard
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Saint Antoine ermite dans
l'église de Rennes‑le‑Château
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Le Père Joseph Chiron
dit Père Marie
ermite de Galamus
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Henri Boudet
voulut non seulement rendre hommage à ce saint homme
non reconnu officiellement par l'église, mais en plus nous
indiquer la piste de Notre Dame du Cros et donc de
Gaudéric Mèche...
On aura tout de même mis de nombreuses
années à comprendre cet indice, et quel indice !

Sans aucun doute,
Joseph Chiron
partageait un secret avec
Gaudéric Mèche et ce
dernier lui apporta manifestement des ressources financières importantes
pour monter rapidement son œuvre bienfaitrice. Que
connaissait‑il du secret de Mèche ? Nous ne le savons
pas. Mais ce qui est certain, c'est que nous découvrons ici
un autre personnage de l'affaire qui est passé en
faisant le bien et que malheureusement l'Histoire
ignora totalement.
Espérons qu'il soit réhabilité avec l'énigme de
Rennes‑le‑Château...

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